Le 3 août 1914, l'Allemagne déclare la guerre à la France, et dès le lendemain chacun des belligérants engage le combat selon les modalités prévues par son Etat-major.

La guerre européenne qui semblait à tous inévitable ne devait durer que quelques semaines, le temps de régler une bonne fois pour toutes le sort de l'ennemi. En accord avec le Plan XVII, les troupes françaises pénètrent dans le Sundgau (Alsace du Sud) annexé en 1871 par le Reich allemand. Parvenus à Hirtzbach le 7 août 1914, elles sont repoussées, et la ligne de front s'établit à quelques centaines de mètres du centre du village, où les Allemands cantonnent.

C'est un nouveau type de guerre qui se met en place : aux grandes manœuvres des bataillons en terrain découvert se substitue une guerre défensive et souterraine. 
De la Mer du Nord à la Suisse, trois armées se font face et commencent à consolider leurs positions en creusant des tranchées. 

La guerre de mouvement cède le pas à une guerre d'usure. On s'installe dans une longue bataille ininterrompue, rythmée par l'attente et l'observation de l'ennemi plus encore que par les offensives.

La première position est composée de deux à trois lignes de tranchées espacées de 200 à 300 mètres. 
La deuxième position se trouve de trois à cinq kilomètres à l'arrière.

Les tranchées sont reliées entre elles par un système de boyaux sinueux pour éviter que les soldats ne soient pris en enfilade par les tirs adverses.

Des fils de fer barbelés fixés sur des montants sont fréquemment installés sur plusieurs lignes successives dénommées "réseaux". Leur mise en place et leur réparation sont généralement effectuées de nuit, et constituent une part importante des travaux des combattants. 

A l'intérieur de ces tranchées sont creusés des abris aux parois soutenues par des rondins côté français, mais souvent bétonnées côté allemand. 

Les conditions de vie sont excessivement dures : outre le froid, les rats, les poux, les odeurs pestilentielles et l'absence d'hygiène, l'ennemi le plus redoutable des combattants est la pluie, qui transforme les tranchées en fondrières malgré les caillebotis qui en garnissent le fond. 


Se battre dans les tranchées

L'armée française se trouve particulièrement peu préparée à la guerre de position qui s'installe avec la mise en place des tranchées. Contrairement aux Allemands, elle n'a pas renouvelé ni développé son fonds d'armes. Les fantassins sont munis de fusils Lebel, mis au point entre 1886 et 1893, et l'artillerie de tranchée est inexistante. L'uniforme militaire lui-même est trop voyant pour les nouvelles stratégies de combat : bleu et rouge, il ne passe pas inaperçu ! 

Le matériel militaire existant se révèle rapidement inadapté : les canons ne peuvent pas tirer depuis une position enterrée ; les mortiers, trop volumineux, ne rentrent pas dans les boyaux étroits creusés pour abriter les troupes ; les baïonnettes sont trop longues pour se battre au corps à corps dans les galeries ; il est impossible de viser avec les fusils sans se mettre à découvert...


Il ne faut pas confondre les ambulances chirurgicales automobiles avec les postes de secours, qui étaient installés dans des abris souvent précaires et dans des conditions difficiles. Parcimonieux, voire quasi-inexistants dans les premières semaines de la guerre, les soins seront ensuite donnés avec une qualité plus ou moins bonne en fonction des capacités d'accueil des ambulances ou postes de secours, hôpitaux de campagne et infirmeries. 


Malgré le dévouement du personnel des services de santé, ces infrastructures médicales sont souvent incapables de faire face à l'influence des trop nombreux blessés, manquant de place, de matériel et d'hommes... Beaucoup de soldats auraient pu être sauvés s'ils avaient reçus en temps utiles les soins appropriés. Mais il s'écoulait trop souvent une longue période entre le moment où le soldat était blessé, celui où les brancardiers parvenaient à le récupérer sur le champ de bataille, et celui où il pouvait recevoir les premiers soins avant d'être envoyé vers les hôpitaux de l'arrière. Il arrivait que les pansements soient faits tout au long de la nuit, voire en pleine obscurité, en tâtant les plaies, la moindre lueur de lampe électrique provoquant une rafale de mitrailleuse. Dans ces conditions, les plaies étaient sales, pleines de terre et de sang...

Durant toute la guerre, lors des attaques, l'afflux des blessés ne permet plus aux brancardiers des régiments, trop peu nombreux et dont la tâche est particulièrement périlleuse, d'assurer correctement leur transport vers l'arrière. Les médecins peuvent alors faire une demande auprès du Service de Santé, afin que les musiciens de la fanfare de leur bataillon soient ponctuellement envoyés en renfort comme brancardiers ! 


L'artisanat de tranchée

Jusqu'à la Première Guerre mondiale, la durée des conflits est en général assez réduite. A part les sièges, les batailles sont rapides et les militaires ne restent pas longtemps dans l'attente du combat.
Avec l'enlisement de la guerre et la mise en place des tranchées, les soldat de 14-18 attendent, retranchés dans leurs galeries, les attaques ennemies ou l'ordre d'assaut. Entre deux offensives ou dans les campements situés en seconde ligne, où ils se reposent avant de retourner sur le front, ils se sentent désœuvrés. 

Cette situation inédite donne naissance à un art populaire singulier : l'artisanat de tranchée. 
Pour passer le temps, certains poilus se mettent à fabriquer, avec des matériaux communs ou de rebut, des objets usuels, des bijoux ou des artefacts décoratifs qu'ils donnent à leurs familles, à leurs amis, ou vendent pour compléter leur solde.

Un grand nombre de conscrits possède en effet une dextérité manuelle importante : artisans ou paysans dans la vie civile, ils savent réaliser de nombreux objets et outils domestiques. Ils mobilisent ainsi ces savoir-faire particuliers au monde rural et artisanal préindustriel pour s'occuper en créant de menus objets.



Les journaux de tranchées

Les journaux de tranchées sont les gazettes des différentes unités, constituant autant de liens entre mobilisés de même origine ou formation. 

Si certains connurent une vie éphémère, d'autres survécurent à la guerre, comme Le Crapouillot ou le Canard Enchaîné. 

Ces journaux aident à lutter contre l'ennui et la démoralisation, et témoignent de l'expérience de la guerre, dénonçant la propagande et les mensonges de la presse de l'arrière.